dimanche 5 octobre 2014

Le verrou

Le verrou

Comme reculant dans l'ombre par peur de la lumière
Des mots chavirent et sombrent dans une mer de misère
Dont le fond se hérisse de ces vérités tues
Qui du cœur des abysses émettent un chant ténu


Mer des actes manqués, des paroles tronquées
Des sentiments réels qu'il fallait déclarer
Tout de go, tels qu'ils sont, car c'est là qu'ils sont purs
Magnifiques et coupants, provoquant la blessure

Ce sont ces mots qu'enfant on déclame comme ils viennent
Parce qu'ils sont évidents, comme l'amour et la peine
Puis un jour la douleur, ou la peur d'en souffrir,
Rhabille les mots du cœur jusqu'à les engloutir


Et qu'il n'en reste plus, errant à la dérive
Qu'un air de déjà-vu, pensée inexpressive.
Dans l'abîme sous-marin les non-dits pleuvent en ruine
Geignant doucement pour qu'enfin on les exprime

Ces mots emprisonnés sont des verbes dangereux
Qui nous font voir nos âmes jusqu'au blanc de nos yeux
Révélant le brutal, l'écorché, le haineux,
L'éperdu, le damné et enfin l'amoureux


Relégués au rebut, ces sentiments croupissent
Et teintent d'amertume les heures les plus propices
Faisant de nous des ombres, sfumati impalpables
De franchise et justesse devenus incapables

Alors, à la surface de nos mers intérieures,
Nous flottons là, sans but, dans l'écume des rancœurs
Dirigées vers nous-mêmes, lâches et prisonniers
D'une geôle de mutisme dont nous avions la clé


Qui attend, quelque part, à portée de nos cœurs
Il nous faudra plonger, l'extraire à la noirceur
Mettre à jour nos épaves quoi qu'il puisse en coûter
Briser les vieilles entraves et dire la vérité

--G4rF--