lundi 28 novembre 2005

...pfff...

Fond sonore : Blur - Charmless man

       Ce week-end a été le week-end de toutes les désillusions.
              Waaaah, ça c'est une bonne phrase d'intro d'un gars qui essaie d'en faire des caisses, style "mes malheurs sont tellement énormes qu'il faut que je les raconte pour pas constiper dessus".
              Bon, reprenons. Avec un peu plus d'honnêteté.

       Ce week-end n'a pas été franchement folichon.
              D'abord, l'espace que je convoitais pour installer ma péniche s'est retrouvé occupé à l'arrache par un bateau inattendu. Il s'avère en fait qu'il va devoir dégager de là dans très peu de temps. Mais bon quand même. Ca me fout un brin les glandes.
              Et pis aussi, y'a La Poste chez qui j'ai souscrit un contrat de réexpédition de courrier qui se fout un peu de ma gueule et me renvoie mes lettres chez moi après les avoir empilées pendant 2 mois. Merci les aggios, merci les factures, La Poste mon cul. Je veux bien payer un peu plus cher si on me garantit que mon courrier va venir à peu près à temps. Mais là, franchement, c'est du putain de foutage de gueule. Ouais, révolution ! (la vache, il est naze mon blog aujourd'hui...).

       Qu'est-ce qui m'a gonflé, aussi, ce week-end ? Ah oui. Y'a que personne au monde n'a l'air de se mettre d'accord sur les noms des vêtements pour bébé. Y'a fallu que je bouffe vingt bonnes minutes sur le Net pour comprendre que la différence entre une turbulette, une gigoteuse et un dors-bien était anecdotique.

       Tout le monde s'en branle ? Ouaip. C'est normal. Faut vraiment se retrouver comme moi en pleine phase de fin de grossesse, avec une maison à aménager, des travaux dans tous les coins, une copine légèrement handicapée par le Zeppelin qui lui pousse dans le ventre et lui confère le rayon de braquage d'un Boeing 747 avec une roue à plat.

       Y'a quand même de quoi causer un brin. Aujourd'hui, Mr Miyagi est mort. Paix à son âme, et que tous ceux qui, petits, ont rêvé de trouver un vieux chinois casse-couille qui leur apprenne le kung-fu pour foutre sur la gueule aux grands sales gosses qui les emmerdaient écrasent une larme en silence.
              Sinon, des tas de machins passent dans les nouvelles. Le premier juge du procès antitrust de Microsoft a déclaré (après s'être fait déposséder du dossier par le DoJ de l'oncle Bush) que, cinq ans après la fin de son instruction, Microsoft avait effectivement enculé tout le monde et affirmait son monopole d'une façon obscène. Dans le même temps, l'ami Gates claque de la thune à tout va pour faire sauter les plaintes des acteurs du logiciel européen contre son abus de position dominante. A tel point que c'est la Free Software Foundation qui est obligée de s'y coller pour pas que le dossier soit enterré également de ce côté de l'Atlantique. Qui peut me dire de combien de pays du Tiers Monde Bill Gates pourrait payer le PIB cash ?
              Les chiffres fluctuent. Mais ça fluctue entre l'indécence ahurissante et l'obscénité écoeurante. Ca lui coûte pas cher de lâcher 40 millions pour une cause ou une autre (je sais plus laquelle, d'ailleurs). C'est comme si je vidais mes poches de mes centimes qui traînent pour les refiler à un mendiant. C'est peanuts.

       Et ça y est, je suis reparti à râler... merde, faut vraiment que j'apprenne à écrire sur autre chose que ça. Que diriez-vous d'un petit poème express, en passant, comme ça ? Hein ? Allez, de toutes façons y'en a pas pour longtemps.

"Sur la verticale lisse
S'embrochent les secondes
Instants de vie complice
Où joies et peines abondent

Sur le sol rocailleux
S'étalent les couleurs
Des turquoises malicieux
Des oranges songeurs

L'horizontale marche
Et s'étire vers l'Orient
En trains de petites tâches
Alignées dans le blanc

L'ombre se lève enfin
Elle est ma familière
Chacun son tour s'éteint
Succombent les chimères"

       Le premier qui comprend quelque chose à ce que je viens de raconter est prié de m'en causer, histoire que je le comprenne moi-même.

       En fait, aujourd'hui, j'avais envie de vous proposer une petite playlist. On y va ? Allez, puisqu'aujourd'hui sur ce blog, c'est la Saint-Dim et la Saint-Sloggy (c'est à dire la fête du slip), pourquoi ne pas achever ces fariboles sans queue ni tête en apothéose bordélique aux couleurs chamarrées (je parle des couleurs des fariboles, là, pas de celles du slip, attention) ?
              Allons-y (dans le désordre)(pour ceux qui ne me connaissent pas, voilà une superbe occasion d'explorer la variété anti-orchestrale de mes goûts dérangés) :
Deportivo - Parmi eux
Archive - Fuck U
Tiken Jah Fakoly - Y'en a marre
Sinclair - Le fonk
Bob Dylan - How many roads
Black Rebel Motorcycle Club - Ain't no easy way
Nine Inch Nails - La mer
Zebda - Je crois que ça va pas être possible
Silmarils - Cours vite
Mickey 3D - La France a peur
Stupéflip - J'fume pu d'shit
Fat Boy Slim - Soul surfing
Eagles - Hotel California (live)
Dream Theater - 3° Misunderstood
Daft Punk - Teachers
Ben Harper - With my two hands
Coluche - J'suis l'andouille qui fait l'imbécile
David Bowie - Changes
De-Phazz - Jazz
Deftones - My own summer
Delegation - Darlin'
Rage Against The Machine - Bullet in the head
Didier Super - On va tous crever
Django Reinhardt - St. Louis Blues
Sade - Is it a crime ?
Sanseverino - Mal ô mains
Smoke City - Underwater love
St Germain - La Goutte d'Or
Bob Marley - War
Stevie Wonder - Part time lover
Sugar Ray - Fly
Superbus - Tchi cum bah !
Svinkels - Happy hour
Téléphone - Flipper
Tori Amos - Crucify
              ...et j'en passe.

       Un dernier truc à la con pour finir ? Allez, mesdames et messieurs, je ne résiste pas à l'envie de vous présenter le résultat (et encore c'est que le début) du travail fourni par Mister BleZzZ, master of zeu dessin and of zeu photo'tchopzn, one of my best friends ever, pour illustrer mon bouquin. Vu l'empressement que mettent les éditeurs à se précipiter dessus, j'imagine qu'il va finir édité sous format électronique. Et pourtant, j'ai eu même pas 6% d'opinions défavorables quand je l'ai fait lire autour de moi ! On approche bientôt de la cinquantaine de personnes qui ont lu mon livre, et dans l'ensemble ça passe grave ! Waaaaaaaah, je veux qu'on me publie ! Je veux pouvoir remercier tous mes béta-lecteurs !
              Bon allez, je vous ai promis une conclusion homérique pour ce florilège abrutissant et chaotique de petits bouts de moi. Alors voilà :
-G4rF-

mercredi 23 novembre 2005

Decepticon !

Fond sonore : Les rythmes digitales - Jacques your body (make me sweat)

       Qu'est-ce que j'ai fait de mal ? Voilà ce que je me demande. Qu'est-ce que j'ai bien pu faire pour qu'on m'envoie taffer à Perpète-Les-Oyes, charmante bourgade s'il en est où le décor pittoresque des hangars le dispute aux bucoliques autostrades bituminées pour créer cette atmosphère douce et entêtante d'emmerdement sidéral.
       Je me fais tristement chier. Mon taff me gonfle, à m'envoyer à mille années-lumière de ma moitié et de sa petite locataire.
       Oui, c'est une fille.
       Et c'est pour bientôt. Fin janvier. 4 Février pour les plus pessimistes.

       Pourtant, je devrais pas être morose, comme ça. Après tout, pendant que de joyeux lutins de Noël décorent les rues et font de petites flambées pour repousser les assauts de Grand-Papa Hiver (avec des voitures, certes, mais ça réchauffe quand même) et que, dans le même temps, je me fais placardiser avec un travail tellement inintéressant que même des strip-teaseuses bulgares avec des paréos turquoises et des guêtres orange fluo en train de chanter "Strangers in the night" sur du Patrick Topaloff tout en frottant leurs poitrines opulentes sur des armoires normandes ne parviendraient pas à me faire lever un sourcil.
              Bon, évidemment, c'est pas trop les sourcils qu'elles sont censées te faire lever, les strip-teaseuses.
              Hé ben ça non plus.

       Je débande à mort.

       Et pourtant... pourtant c'est l'hiver. Et moi j'aime bien l'hiver. L'hiver est peut-être le seul contact qu'il me reste avec une nature agréable. Je m'explique (avec une mauvaise foi incalculable, certes, mais je m'explique).
              J'aime pas le printemps. A cause des petites fleurs et de la putain d'allergie que je me traîne depuis... putain, ça fait tellement longtemps que je sais même plus de quand ça date.
              Et pis j'aime pas l'été. Il fait trop chaud en été. Avec mes nombreux centimètres de haut, je suis déjà plus près du soleil (et moins près de l'air frais qui, comme le disent toutes les pancartes de sécurité en cas d'incendie, est près du sol). Et pis avec mes gènes de Viking, je suis plus apte à tenir le choc au pays des peaux de bête et des ours blancs que celui du monoï, du jojoba et des pluies tropicales.
J'aime pas l'automne, parce que ça me déprime. La rentrée, la fin des vacances, tout ça.
       Non, décidément, j'aime que l'hiver. Gratter la voiture le matin, moi, ça me fait rigoler.
              Se blottir contre ma copine pour se réchauffer quand il fait froid dans le pieu.
              Un grand bol de chocolat quand il caille.
              L'envie d'écrire dans mon blog...
              L'hilarité devant les p'tits Français de la ville incapables de conduire quand il tombe 3 cm de neige.
       Et puis les batailles de boules de neige. Ca a l'air con, mais moi, je suis super fan. Ca m'a toujours fait rigoler, et même si je suis devenu bien trop grand pour me planquer derrière le fort imprenable numéro 234, ça me botte. Et puis les balades sous la neige, quand la neige fait crountch sous tes pieds, et que tout ce qui était crade devient soudain d'un blanc silencieux.
       Voir les traces de patte d'un chat sur le capot de ma voiture. Voir un bonnet à pompon qui dépasse de la foule des bonnets présentables sur le quai du métro.
              Ouais, franchement j'aime bien l'hiver. Faire un feu dans la cheminée avec le bois que tu t'es fait chier à ramasser ou à couper pendant des heures (bon, ça, c'est du fantasme, c'est pour quand on aura une cheminée). Voir son souffle faire un rond de buée sur la fenêtre derrière laquelle on est bien au chaud tandis que de l'autre côté, de gros flocons tombent tout droit et s'empilent à vue d'oeil en une strate immaculée à faire pâlir d'envie tous les réalisateurs de pub de glace à la vanille.
              Boire un truc chaud avec les potes, un grog ou un thé, en étant bien content d'être à l'intérieur.

       Y'a quand même un truc qui me déplaît dans les hivers d'aujourd'hui, c'est l'arrivée de plus en plus avancée des décorations de Noël dans toutes les villes et dans nos boîtes aux lettres. Moi je sature. Noël, ça a peut-être l'air con dit comme ça, mais pour moi c'est vraiment la fête des fêtes, parce qu'aussi loin que je m'en souvienne j'ai toujours passé Noël avec de la famille, des amis, plein de monde qu'on n'a pas vu depuis longtemps et qu'on est content de retrouver. Y'a les cadeaux, certes, mais y'a aussi l'ambiance surréaliste des nuits passées il y a déjà longtemps en allant en traînant les pieds à la messe de Noël où on s'aperçoit avec une sensation étrange de satisfaction inattendue et d'empathie surprenante que tout ce monde qui ne se connaît pas et ne se dirait peut être même pas bonjour si on leur en laissait l'occasion, a accepté d'en chier un peu dans le froid pour aller se retrouver tous dans le même coin et marquer le coup, une bonne fois pour l'année.
              Religion ou pas, moi je trouve ça assez classe.
       J'en ai plein le cul de voir des sapins de Noël en rayon dès le début du mois d'Octobre. La déco de Noël, c'est comme les cadeaux de Noël, ça devrait pas exister avant Décembre, ni après Décembre. Sinon, ça perd tout son intérêt. Comment peut-on marquer le coup quand tout est déjà tellement préparé, codifié, étiqueté ? Quel est le foutu plaisir qu'il y a là dedans ?
              Ce qui est kiffant, c'est que ça reste une fête. Et avec ces gros couillons de Carrouf' ou d'Auchian, et j'en passe et des meilleures, qui nous en donnent à bouffer pendant un quart de l'année, on est content d'être débarrassé de Noël pendant les 9 mois suivants.

       C'est peut-être le plus foireux de tous mes coups de gueule, parce que c'est plutôt un coup de blues, un rappel de la grand-mère à moustache du genre "c'était mieux avant". N'empêche que ouais. Moi je dis que Noël, c'était mieux avant. Avant Carrefour, Noël avait encore un sens, même pour ceux qui officiellement (c'est à dire d'un point de vue croyance) n'en ont rien à carrer.
              Après tout, c'est quand même une fête païenne, au départ ! Un peu comme la Toussaint qui tombe sur une équinoxe, des choses comme ça.
       Lisez "Le Père Porcher", de Terry Pratchett (chez l'Atalante)(qui, au passage, me procurerait une satisfaction exceptionnelle en acceptant d'éditer mon bouquin parce que s'il y a bien un éditeur chez qui j'ai envie d'être édité, c'est eux)(et là, je rigole pas : je trouverais ça bien plus honorable d'être dans les collections où on trouve Pratchett que là où on trouve Sulitzer). C'est, ni plus ni moins, un excellent conte de Noël. Avec toute la loufoquerie du Disque-Monde, certes. Mais c'est quand même quelque chose de grandiose.

       Allez, je vais retourner bosser, tout en réfléchissant à mes cadeaux. Cette année, je ne pourrai pas satisfaire tout le monde (comme tous les ans) mais j'espère bien arriver à bidouiller quelques trucs qui fassent vraiment plaisir.
-G4rF-

jeudi 17 novembre 2005

Un de chute

Fond sonore : Les motivés - Le chant des partisans

       Encore un coup de pelle en pleine gueule. Hier c'était JC Lattès, aujourd'hui c'est Gallimard (et la NRF) qui m'envoient promener. Total : 40% de rejet, 10% d'en cours, 50% d'inconnu.
       Je me demande si on pourrait pas remplacer Diefenthal par Steven Segall dans le film. Ou alors par Adam Sandler. Enfin bref, par quelqu'un de super doué dans son petit créneau de lourdingue.
       Evidemment, cela n'engage que moi.
-G4rF-

mercredi 16 novembre 2005

Ce blog va finir par changer de nom...

Fond sonore : Sinclair - Le fonk

       ...et s'appeler "Echec en 10 leçons". Encore un éditeur qui vient de me jeter. Bon, comme le dirait ma moitié, c'est jamais que le cas général de ce qui arrive à 99,9% des auteurs en France. Mais quand même... J'en suis à 30% d'échec, 10% d'accusé de réception et 60% d'inconnu...
       Dur, dur, d'écrire. Mais j'y arriverai. J'ai confiance. Et si j'y arrive pô je m'en fous, je vends mon bouquin à Besson pour qu'il en fasse un scénar, c'est Krawczyk qui réalise et y'a Frédéric Diefenthal dans le rôle-titre.
       C'est compris, les éditeurs ? Achetez moi mon bouquin, sinon vous en subirez les conséquences ! :-)
-G4rF-


mercredi 9 novembre 2005

Faut que ça sorte !

Fond sonore : Trust - Antisocial

       Ouuuuuuh putain... je viens de me colleter une discussion enflammée avec le prototype le plus caricatural que j'ai connu du bon petit soldat sarkozyste. Le genre "c'est pas mon problème, il faut faire avancer la France, mais moi je paie mes impôts alors merde !".
              Et il paraît qu'il s'est reproduit. Un tel degré d'égocentrisme et d'auto-illusion chez une personne capable de se mettre debout, de parler, de lacer ses chaussures et d'aller aux toilettes tout seul me sidère.

       Et celui-là, putain, qu'est-ce que j'aimerais me dire que c'est le champion du monde, le pire crétin bouffi de suffisance incapable d'envisager la réflexion sur les arguments des autres que j'ai rencontré ! Mais je sais, parce que ce monde ressemble à ce qu'il est et que PPDA présente toujours le 20h et fait toujours de la lèche au pouvoir en place, qu'il y en a d'autres. Des pires.
              Il dit que les restos du coeur ne servent à rien et entretiennent le "parasitisme". Il dit que Le Pen ne fera jamais de gros score parce qu'il a un parti microscopique. Il dit que les gosses qui foutent le feu aux voitures se rapprochent de l'humain et essaient de s'en sortir.

       Le premier qui trouve une logique valable dans tout ce bordel, et non un ramassis indigeste d'idées toutes faites récupérées à gauche et à droite pour maintenir le confort ouaté dans lequel l'imbécillité fondatrice du mental incertain de ce notoire zozo clapote douillettement, hé ben qu'il m'écrive, je lui dirai à quels endroits sur la planète aller habiter pour que je n'ai pas le malheur de le croiser sur mon chemin.
       Ignorance is bliss.
       But stupidity is like nuclear power. It can be used for good, or evil. And you don't want to get any on you.
-G4rF-

              PS : j'oubliais... un deuxième éditeur a jeté mon bouquin. Tchô, Albin Michel, on t'aimait bien... tant pis. Au moins, leur bafouille n'avait pas l'air trop stéréotypée. S'ils avaient pu la signer, ça aurait quand même fait plus vrai, mais bon. Je vais finir par vendre mon livre en feuilleton à un magasine. Je veux qu'on m'édite ! Ouiiiiin !

lundi 7 novembre 2005

The roof is on fire

Fond sonore : Bloodhound gang - Fire water burn

       Savez-vous ce que j'aime dans ce pays ? Non, je veux dire, ce que j'aime vraiment ? C'est simple : tout le monde est champion du monde pour identifier la source des malheurs de ses semblables, mais personne ne se bouge le cul d'un centimètre pour aller donner un coup de main, mettre en place une solution, et surtout faire face à ses responsabilités.
       Alors qu'autour de nous des bandes de crétins s'imaginent jouer à la guerre et faire des actes héroïques de révolution efficace en foutant le feu (quel exploit) à des voitures, des poubelles, des Saint-Maclou, des entrepôts, des autobus, bref que des trucs vraiment indispensables à l'équilibre de ce pays et sur lesquels reposent les fondements de nos institutions, je vous propose aujourd'hui plusieurs axes de réflexion et quelques solutions à envisager pour, par exemple, savoir appeler un chat un chat, savoir assumer ses propres conneries et savoir faire la différence entre l'outrage ressenti par les familles entassées à 24 dans un F3 depuis 20 ans et la colère bidonnée des fils de famille qui s'habillent en caillera pour pas se taper la honte entre deux giclées de SMS et une soirée Star Académerde (putain, dire que Madonna y passe... décidément, les années 80 sont bel et bien mortes).
       Par exemple, quand on voit une voiture qui brûle, on la filme. Et on la passe à une heure de grande écoute. Intérêt de la manoeuvre ? Nul. Tout le monde sait déjà que c'est la zone dans certains coins, et que même s'il s'agit des agissements d'une ridicule minorité, ça fait chier un maximum de personnes. Mais ça permet de parler d'autre chose que de la guerre larvée en Irak dont tout le monde se branle puisque tous les Français sont d'accord pour dire que c'est à l'ONU et pas à Bush d'aller jouer les gendarmes du monde. Et pis ça fait marcher l'insécurité. C'est bien, ça, l'insécurité, ça fait voter Chirac et Le Pen, c'est super top tendance comme sujet. Une réaction entendue pendant une émission d'"Arrêt sur Image" sur F5 : à Strasbourg, pour faire descendre la tendance à flamber des voitures pour la Saint Sylvestre, on filme plutôt les voitures éteintes. Message passé chez TF1 ? Naaaaaaan, y'a des limites à la vente de temps de cerveau, quand même.
              Et qu'est-ce qui pousse Françoise Laborde à dire que les deux gamins qui ont clamsé dans le transfo l'ont été à la suite d'un crambriolage alors que l'information a été officiellement démentie dès le début de la journée ? L'habitude de baver sur les beurs qu'ont tous les journaleux télévisuels ? Non ? Mais alors, si elle est capable de manger son chapeau à Arrêt sur Image, pourquoi ne le fait-elle pas officiellement, en direct, le lendemain, en plein JT ?
       Voilà une solution pour calmer les esprits qui ne cherchent qu'une occasion pour partir en vrille : forcer les journalistes qui ont dit des conneries à s'excuser à l'antenne. TF1 ne le fait pas. La preuve, PPDA présente toujours le JT malgré son interview bidonnée de Fidel Castro. France 2 ? J'attends encore les excuses publiques de Françoise. M6 ? Jamais. En tout cas, rien depuis que Serge Molitor et son clin d'oeil facétieux ont disparu de l'écran. LCI ? iTélé ? CNN ? Que dalle. La presse écrite a un devoir de vérité. Pourquoi pas la presse poubelle ? Euh, la presse télé ? Voilà qui ferait avancer les choses.

       Question connexe : pourquoi des gamins de banlieue courent-ils quand il y a des flics dans les parages ? Parce que ce sont des voleurs ? Ou parce que les flics sont flippants ? Anecdote vécue : pendant mes études d'ingénieur, nous avons fait une chouette balade à travers la France pour visiter les locaux de l'ONU à Genève. Départ en bus d'Orsay pour toute la promo, sauf moi et trois potes qui ne rentrions pas dans le bouzin. On a fait le voyage en caisse, la caisse du papa de Lamine (coucou en passant, mon Lam's !). Et on a presque tous conduit à un moment ou l'autre. A votre avis, à quelle occasion est-ce que la douane volante nous a arrêtés et fouillés ? Quand un gentil Blanc conduisait ? Ou quand Lamine, major de promo fortement sympathique mais tragiquement pour l'occasion affublé d'une tête ni tout à fait berrichonne ni franchement bretonne mais complètement beuresque, était au volant ?
              Ce jour-là j'ai découvert ce qu'était la douane volante. J'ai aussi découvert le racisme ordinaire. Quelques années plus tard, mon ami BleZzZ me trouait littéralement le fondement en m'expliquant que, pigiste pour une agence de comm' (pour ne pas dire une société de publicité et de réclame, ou un afficheur casse-couille), il travaillait avec un directeur artistique à la peau pas franchement ivoirine mais plutôt ivoirienne sur une plaquette pour une banque quelconque. On lui dit "mets des gens là, et là, et là". BleZzZ, plutôt ouvert d'esprit, ne se pose pas de question : il met du blanc, du noir, du jaune, bref il ne manquait que le fils de Sitting Bull et un ou deux martiens pour faire Benetton. Et là, son D.A. black dit : "non, enlève ça, ne mets que des blancs".
              C'est à cette occasion que j'ai découvert le racisme sous-jacent.
              Et encore aujourd'hui, je constate autour de moi très très peu de pubs avec des noirs, ou avec des asiats, et je ne crois pas me souvenir d'une seule pub avec des beurs. Pourtant, la France est pleine de français pas blancs. Le melting-pot, il est là, chez nous. Y'a des Loussa, des Brahim, des Safwann, des Farid, des Fatima, des Marcel, des Saint-Cyr, des Minh, et j'en oublie. Partout. Dans ton métro, dans la voiture devant toi, sur la plage de tes vacances, derrière les logiciels de ta machine et tenant le balai qui nettoie tes couloirs. Mixing the colours, chante Iggy Pop. Ca donne des choses mignonnes, genre Noémie Lenoir, ou Noam (c'est le fiston de BleZzZ et May, un ptit bout d'homme grand comme ça et franchement adorable). Du joli, quoi.

       Encore une solution pour arrêter de se regarder en chiens de faïence : se regarder, tout court. Je veux voir des pubs de lessive avec une arabe qui vante Skip Machine. Je veux voir des enfants asiatiques en train de manger des Kinder Pingui. Je veux des plaquettes de produits d'assurance-vie avec des couples "hors norme" : des noirs, des rouges, des jaunes, des bleus (pas des M&Ms, hein !), des homos, des hétéros, des trans, des handicapés, des aveugles, des sourds, des gens, quoi ! Je veux voir des pubs Aubade avec des beurettes ! Je veux que l'image ressemble au réel !

       Un collègue de travail qui habite Bondy me dit qu'en fait, les "événements" actuels sont très circonscrits, et que les médias portent leur part de responsabilité dans la multiplication des feux de voiture. Je suis d'accord. En ce moment, qui t'écoute quand tu te plains ? On te cambriole : ta plainte sera classée. Tu habites à 10 000 dans un placard, tu te plains : fin de non recevoir, y'en a d'autres qui n'ont pas de toit. Tu as faim, tu veux de la thune : t'es en fin de droit, ta plainte tu te la carres où le soleil ne brille jamais. Montre des images de villes qui flambent, et tout le monde, jusqu'au dernier connard boursouflé de haine pour ce pays de cons où personne ne l'écoute et où personne n'a de temps ni de moyen pour l'aider à souffler un peu, se sent autorisé à foutre le feu à tout et tout le monde pour libérer sa haine.
              Question : comment on arrive-t-on là ? Quelle est la proportion des gens vraiment malheureux qui vont aller dépenser cinq euros d'essence à la pompe pour se faire un cocktail Molotov et brûler la voiture du voisin parce qu'ils en sont jaloux ? Quelle est la part des propriétaires d'entreprises qui vont profiter de ce merdier pour foutre le feu à leur stock et toucher l'assurance ? Quelle est la part des connards qui foutent le feu à leur école parce qu'ils se sont fait virer à force de ne rien foutre ? Et face à tous ceux-là, combien rongent leur frein depuis des années, en espérant que la vie prenne un peu plus de couleur et les sortent du gris et sont systématiquement déçus par les promesses télévisées ?
       Arrêtons de clamer qu'il faut une belle voiture pour estimer avoir réussi. Arrêtons de dire que si t'as un C.A.P., t'es une merde et tu n'avanceras jamais. Arrêtons de dire qu'un type en costard en vaut quinze en bleu de travail. Ma conviction personnelle est qu'on peut estimer avoir réussi quand on peut jouir avec tranquillité du fruit de son travail, et qu'aucun balayeur d'aucune ruelle sordide de n'importe quelle cité n'a à rougir de son métier. Michael, un ancien pote de chez Matra, avait bossé comme stagiaire dans une cimenterie où taffait son père. Et pendant deux mois, il avait balayé. Y'en a de la poussière, dans une cimenterie. Et bien, tenez-vous bien, balayer correctement ça s'apprend. Et c'est pas facile. C'est physique, de balayer. C'est dur. Seriez-vous capable de vous arrêter dans la rue, de vous tenir debout face à l'homme en vert qui balaye les merdes de votre chien du trottoir vers le caniveau et de lui dire : "j'apprécie ce que vous faîtes ?". Non. Et c'est pour ça que ça merde.
              Une solution : faites l'effort de vous mettre dans les baskets de ceux que vous avez en face de vous, et dites-vous qu'ils ne font pas un métier de con, mais un métier difficile. Et ça, ça se respecte.
              Autre solution : quand on fait une promesse à un malheureux, on la tient. Personne ne se révolte en apprenant qu'on coupe systématiquement dans les crédits de logement et de prévention des banlieues chaudes depuis des années, mais tout le monde hurle à la trahison quand sur 500 millions de dollars promis au Cachemire après le tremblement de terre, il n'y en a même pas 10% qui ont été versés. Ne pas se foutre de la gueule des gens est encore la meilleure méthode connue pour qu'ils ne vous collent pas leur poing dans la figure.

       Ce que je suggère, pour changer les choses, c'est de démontrer, par A + B, à tous les désoeuvrés débilisés qui incendient des bagnoles et des commerces pour passer le temps, que le monde qui les entoure n'en a pas rien à foutre de leur existence. Qu'il y a un futur pour les gamins qui n'en peuvent plus, à l'âge où on veut changer le monde, de devoir s'entasser dans les mouroirs bétonnés des barres d'immeubles décrépies à l'heure de dormir dans une promiscuité étouffante, et que ce futur n'est pas nécessairement la défonce et la destruction. Au lieu d'aller les chercher et de leur faire des ponts d'or pour les intégrer "de force" dans les structures d'élite et laisser tous leurs potes et leurs compagnons d'infortune surnager dans leur merde (je fais référence à une proposition d'Yves Jégo, député de Montereau*), que la société dans laquelle ils vivent reconnaisse leurs mérites. Pourquoi ne pas installer une annexe de Polytechnique à la Courneuve ? Pourquoi pas Centrale et Normale Sup' à Aubervilliers ? Pourquoi ne pas installer Hewlett Packard à Saint Denis ? Pourquoi pas Vaux-en-Velin-Antipolis ?
              Les travailleurs sont là. La volonté de bosser est là. L'énergie est là. Le pognon y viendra. Que manque-t-il, alors ?
-G4rF-
       *au sujet de Montereau, où j'ai eu le malheur d'aller traîner mes basques, je tiens à préciser quelques trucs. Il s'agit d'une très vieille ville, au confluent de la petite Seine et de l'Yonne. La vieille ville est en bas, construite autour des fleuves. La cité, Surville, a été construite sur les hauteurs, et domine de façon très moche le paysage. Si vous êtes venu du Sud à Paris par le TGV, c'est la première "borne kilométrique" qui vous indique que vous approchez à grand pas de la capitale. Depuis quelques années, des efforts sont entrepris pour flinguer cette immondice et en faire un endroit décent pour vivre. Mais sachant que tout ce qui a été trouvé pour reloger les habitants des frites de béton qui sont géographiquement franchement à l'écart de la ville, c'est de faire des plus petits bâtiments... juste à côté des grandes frites. C'est à dire toujours à l'écart de la ville. Je pense pas qu'il faille sortir de Sciences-Po pour pouvoir conclure : ça craint.